Performance, par le Studio d’Action Théâtral
CONFESSION D’UNE DÉESSE
Au coin du bar, au bord d’un banc, à l’angle de la rue, Jane nous raconte son histoire. Son mariage brisé par la quête du succès, sa solitude, ses désirs coupables pour un autre homme, sa meilleure amie perdue trop tôt, sa voisine qui tente malgré l’alcool et la déchéance de son fils de maintenir son foyer à flot. Jane nous raconte son quartier, un peuple réputé disparu, soigneusement invisibilisé, ce peuple sans intérêt que l’on se plaît à brocarder discrètement dans l’entre-soi des puissants, un peuple du PMU, du café et de la pause clope, un peuple du bureau, de l’hôpital et de l’usine où l’on « donne toujours plus pour moins », un peuple rongé par des rêves de réussite, les désenchantements, les idoles permabronzées du grand divertissement, la haine de soi-même et l’espoir illusoire qu’un monde plus brillant, plus confortable, plus accueillant se trouve au bout du chemin. Tel un ange posé sur son épaule, la voix d’un poète lui susurre les mots qui réenchantent le monde et elle voit dans chacun.e une flamme vitale, divine, brûler. Loin de tout mysticisme et hors de toute morale, Jane vient invoquer la force vitale qui réside en l’Humain et qui fait de nous, ses voisins, ses amours et son public, des héros du quotidien.
INVOQUER LES DIEUX PAR LA MUSIQUE
Jane alterne entre une parole intime où elle revit ses amours, ses rencontres et ses luttes, et des chants incantatoires où elle en appelle à la puissance des dieux que nous étions. Accompagnée par Ulysses Alvarez à la batterie et à la basse, Marie Brugière passe habilement des passages narratifs aux morceaux musicaux. L’atmosphère punk créée par les sons de basses saturées et les effets de distorsion sur les voix campent l’univers urbain, métallique et hostile dans lequel Jane évolue. La musique, bouclée en live, sans préenregistrements, ajoute à l’ambiance lo-fi, intime et personnelle du texte. Tout ce qui est entendu est fait sur scène, en toute transparence. À l’instar de groupes punk comme Virgin Prunes, Bauhaus et Divide and Disolve, les lignes mélodiques et rythmiques sont brutes et portent une intention franche. Formant un duo atypique, Marie avec une scansion incisive et Ulysses par sa batterie puissante et sa basse éraillée, font la part belle à la rage et à l’espoir du personnage.
Par le SAT,
Direction artistique: Gabriel Alvarez
Jeu:Marie Brugière
Composition musicale, batterie, basse: Ulysses Alvarez
Texte : à partir de William Bmake et Kae Tempest